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Formation des équipes : l’effervescence « Nous sommes là pour faciliter la montée en compétences des salariés de nos branches »

Dominique Braoudé, président d’Ocapiat (à g.), Corinne Lelong, présidente de la commission sectorielle paritaire secteur alimentaire et DAS de La Coopération agricole, Jonathan Emsellem, directeur général d’Ocapiat.

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Opérationnel depuis janvier 2020, l’opérateur de compétences (Opco) Ocapiat, auquel sont rattachés les coopératives et négoces agricoles, n’a de cesse d’épauler les entreprises dans leurs démarches d’évolution des compétences en déployant études et services, dont les derniers-nés, le diagnostic RH + et l’outil Geocapiat. Dominique Braoudé, son président, Jonathan Emsellem, son directeur et Corinne Lelong, présidente de la commission sectorielle paritaire secteur alimentaire (et DAS de La Coopération agricole) nous décrivent l’essentiel de cet accompagnement.

Pouvez-vous rappeler l’essentiel de la réforme de 2018 qui a vu naître votre Opco ?

Dominique Braoudé : La loi du 5 septembre 2018 sur l’avenir professionnel a, en premier lieu, modifié le rôle des Opca (organismes paritaires collecteurs agréés) qui sont devenus des Opco (opérateurs de compétences). C’est de là qu’est né Ocapiat, qui réunit cinquante branches de la filière alimentaire (productions, coopératives et négoces agricoles et industries alimentaires), de la pêche et des cultures marines, et aussi des acteurs du territoire.

Cette loi a modifié également les dispositifs de financement, en réservant le financement mutualisé du plan de développement des compétences (ancien plan de formation) aux entreprises de moins de 50 salariés, au lieu de 300 auparavant. Les entreprises de 50 salariés et plus contribuent toujours à la formation professionnelle et en ont donc peu de retours.

Jonathan Emsellem : La réforme de 2018 a changé en effet beaucoup de choses. Ainsi, l’apprentissage est devenu une nouvelle mission confiée aux Opco qui gèrent dorénavant son financement, mission dévolue auparavant aux Régions. Sur 2020, première année de cette mission, les résultats sont très positifs puisque nous dépassons de 40 % les objectifs prévus, avec plus de 10 000 contrats d’apprentissage engagés dans le secteur alimentaire, avec une mise en œuvre facilitée par la réforme et les aides de l’État.

La réforme conforte en fait le rôle des partenaires sociaux de branche dans la définition de la politique de formation en y ajoutant la politique d’apprentissage.

Sur ce sujet de l’apprentissage, la réforme permet d’ouvrir son propre CFA. Qu’en est-il ?

D. B. : En effet, tout organisme peut désormais créer son propre CFA, y compris une entreprise. Lactalis a ainsi monté le sien. Il suffit de le déclarer en préfecture, une fois créé. Cependant, ce CFA, comme les autres organismes de formation, devra obtenir la certification qualité Qualiopi d’ici le 1er janvier 2022 pour pouvoir bénéficier de fonds publics et mutualisés.

Corinne Lelong : Ce sont surtout les entreprises qui étaient déjà des OF qui s’interrogent sur le fait de devenir CFA car elles sont assez organisées pour cela. Sur le périmètre coopération agricole, c’est surtout un problème géographique. Il faudrait en effet un regroupement de plusieurs coops pour répondre à l’objectif de volume pour que le CFA soit rentable. L‘apprentissage reste toutefois un métier. Aussi, il semble plus prudent de se rapprocher des partenaires qui font déjà de l’apprentissage pour peser sur le contenu, plutôt que de créer un autre CFA. Murielle Pénicaud souhaitait de nombreux CFA d’entreprise, mais cela ne décolle pas tant que cela.

Face au manque de financement pour les plus de 50 salariés, que propose Ocapiat ?

C. L. : Un des objectifs d’Ocapiat est de trouver des dispositifs et moyens pour accompagner toutes les entreprises, y compris les plus de 50 salariés. Le nouveau dispositif Pro-A (promotion par alternance) remplace partiellement la période de professionnalisation pour financer de l’alternance à destination des salariés. Il a donné lieu à un accord, en janvier 2020, entre La Coopération agricole, le négoce agricole et les branches de l’industrie alimentaire, autour de plusieurs certifications ouvrant le bénéfice à la Pro-A. Cet accord a été étendu en novembre 2020 pour que les entreprises du secteur alimentaire puissent avoir accès à la Pro-A.

D. B. : On réfléchit aussi à d’autres accompagnements comme l’utilisation du CPF avec des mécanismes d’abondement par les entreprises et par l’Opco.

J. E. : Par ailleurs, nous cherchons à développer des partenariats sur tout le territoire, grâce à notre réseau de conseillers, pour avoir le plus de complémentarité possible entre les dispositifs des pouvoirs publics et ceux de l’Opco. Nous souhaitons avoir un effet levier pour les entreprises en allant chercher des cofinancements européens, nationaux ou régionaux. Ainsi, sur fin 2020, un partenariat avec le fonds social européen a permis de financer le reste à charge pour certaines formations dans des entreprises entre 50 et 250 salariés. Pour sa première année de mise en œuvre opérationnelle, en 2020, Ocapiat a souscrit plus d’1,2 milliard d’euros engagés sur son périmètre. Cela concerne des dispositifs pour des besoins de formation immédiats, pour développer des compétences, des certifications et aussi l’alternance, la Pro-A, les nouvelles modalités comme la formation en situation de travail. Le financement peut couvrir aussi les diagnostics réalisés par un réseau de prestataires pour soutenir les entreprises dans la mise en œuvre de dispositifs de formation.

Pour quels types de certification, le dispositif Pro-A que vous venez de citer est-il accessible ?

C. L.   : Ces certifications sont principalement des diplômes et aussi des CQP inscrits au RNCP (Registre national des certifications professionnelles). Nous allons d’ailleurs rénover les CQP dans le cadre de la charte emploi alimentaire signée pour la période 2020-2022, qui mobilise des crédits du Pic. Le CQP technicien conseil aux adhérents de coopérative va être ainsi rénové de manière à ce qu’il puisse mieux fonctionner que par le passé et soit mieux adapté aux nouveaux enjeux. Il pourrait être étendu au négoce agricole qui semble s’intéresser à la refonte de ce CQP transverse.

Quels sont les services proposés aux entreprises pour les accompagner dans leur évolution ?

C. L. : Les Opco sont les bras armés des branches en matière de formation professionnelle. Ils sont très précieux sur l’apprentissage, comme nous l’avons dit, ou encore dans la communication de dispositifs à l’image de ceux pour promouvoir les métiers.

Nous, branches, on capitalise beaucoup sur l’expertise d’Ocapiat pour aider nos entreprises à être sur la gestion prévisionnelle des emplois et sur l’anticipation des compétences dont on aura besoin demain. Au sein d’Ocapiat, nous avons une commission sectorielle paritaire pour le secteur alimentaire, que je préside, et qui permet de garder quelques spécificités grâce au soutien des services d’Ocapiat. Ainsi, nous travaillons avec eux sur les observatoires des métiers, chaque organisation, industries alimentaires, coopération agricole et négoce, ayant son propre observatoire.

Des études sont menées en commun entre les observatoires, lorsque c’est justifié, tout comme on peut piloter des études spécifiques à l’image de celle conduite par les partenaires sociaux de la coopération agricole sur les emplois stratégiques, en tension et innovants, qui devait être validée fin juin 2021.

J. E. : Nous avons développé aussi tout un panel de services relayés par nos conseillers Ocapiat sur le territoire auprès des entreprises qu’ils accompagnent pour identifier leurs besoins et proposer des réponses.

Dans notre offre de services, nous avons veillé à avoir des solutions de différentes natures : diagnostic de compétences, diagnostic RH et aussi RH + qui vient de sortir pour les 50 salariés et plus, formation de collaborateurs en interne ou en externe, dispositifs d’alternance, dispositifs spécifiques. Le diagnostic RH + peut intervenir en amont de projets telle la création d’un OF interne, voire d’un CFA, ou encore la digitalisation du parcours de formation. On vient aussi de créer l’outil Géocapiat qui, en quelques questions, permet d’être orienté géographiquement vers les formations recherchées. Et nous avons un catalogue de formations alimenté par des achats de modules par l’Opco, à partir des besoins préalablement identifiés.

Ces services sont-ils payants ?

J. E. : L’offre régionale de formation est mise à disposition pour les moins de 50 salariés avec une prise en charge totale, et pour les 50 et plus, on doit légalement demander une contrepartie. On achète pour plus de 20 M€ de formation, donc les prix seront nettement plus bas pour l’entreprise que si elle achetait seule. Des contreparties sont demandées aussi pour le plan de développement des compétences pour les 50 et plus. Pour l’apprentissage, la prise en charge de l’Opco se fait dans le cadre des règles votées par le conseil d’administration quelle que soit la taille de l’entreprise. Et ce, afin de développer le dispositif d’alternance.

Comment voyez-vous évoluer à l’avenir la formation et ses modalités ?

J. E. : Dans le cas de notre Opco, le niveau de dématérialisation devrait augmenter pour rendre le plus simple possible l’accès à la formation et limiter les démarches administratives. C’est, pour nous, un enjeu de qualité de service. Par ailleurs, nous nous sommes dotés, depuis le printemps 2020, d’une plateforme virtuelle Camp’Num qui diffuse des capsules de formation et peut offrir un espace privatisé aux entreprises qui y déposent leurs formations et en donnent l’accès à leurs salariés.

D. B. : Nous sommes là pour accompagner tout ce qui est innovateur et va faciliter la formation des salariés. Nous développons des Mooc sur notre plateforme en ligne et sommes partenaire dans la formation virtuelle « Agrovirtuose ».

C. L. : La formation devient extrêmement stratégique afin de faire évoluer les personnes en poste ou attirer les jeunes générations. Par exemple, pour les coopératives, nous développons tous les moyens possibles pour la favoriser. Nous irons chercher ainsi de l’e-learning si c’est nécessaire. Cependant, nous pressentons que ce ne sera pas le tout-digital. Nous sommes en effet très vigilants sur le besoin en présentiel. Il s’agit en fait de trouver un mix intelligent.

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